La semaine dernière, j’ai rencontré une artiste qui m’a racontée comment elle avait perdue des années à donner son pouvoir artistique à d’autres1 car elle ne se croyait “pas légitime”.
Ce “pas légitime” je l’entends tout le temps et je l’entends bien trop. Et à chaque fois je sens une gêne en moi et je me dis, mais c’est quoi ce hold-up.
Pas légitime par rapport à qui ? Comment ça se fait qu’on a développé un système qui nous paralyse au lieu de nous encourager à tester, à explorer, à apprendre, à faire ?
À quel moment on a oublié que le sens de la vie c’était précisément de la vivre ?
Il n’y a pas de mode d’emploi sur ce qu’on est supposé faire parce qu’il n’y a pas de ligne d’arrivée à l’existence de notre planète ou de notre race. On vit jusqu’à ce qu’on meurt, à l’échelle individuelle comme à l’échelle collective. Sauf qu’aujourd’hui le “pas légitime” fait que beaucoup trop de personnes arrêtent de vivre avant de mourir.
Et moi ça me pose problème.
Notre attention n’est plus sur suivre notre curiosité, notre attention est sur “comment je vais payer le loyer déjà que j’aurai pas de retraite…” Et attention, je ne dis pas que ce ne sont pas des préoccupations importantes, et que les peurs liées au manque et à la précarité ne sont pas justifiées. Elles n’ont jamais été aussi réelles qu’en 2021 en France.
Mais on n’a quand même qu’une seule vie et c’est ça le hold-up. Nous faire croire que le but de notre vie c’est de rester en vie d’une manière spécifique et limitante : en faisant des choses qui rapportent de l’argent et/ou de la gloire.
Faux.
Moi je pense que notre seule fonction est de participer à l’évolution, et quand je dis ça je veux dire : à l’évolution du tout qu’est notre race humaine interconnectée au Vivant interconnecté à notre planète interconnecté à l’Univers, mais déjà restons sur Terre.
Et pour participer à l’évolution c’est facile, il faut s’écouter, tester des trucs, les partager avec le collectif, voir ce que cela provoque comme changements en nous et autour de nous, recalibrer et recommencer. Voilà c’est tout.
Ça ne résout pas le loyer et le frigo mais ça rend vivant et ça donne du sens à qui l’on est, à ce que l’on fait et à pourquoi on est là.
Et tout à coup, quand on fait en se disant qu’on contribue à l’évolution, on s’en fout d’être légitime puisqu’on ne cherche plus à “bien faire pour être validé.e” mais à participer à la co-création du monde. Car le monde se créé tous les jours.
Et tout à coup on sait que ce que l’on fait aujourd’hui et qui n’a l’air de rien trouvera son sens dans la continuité de notre vie et connectera avec une histoire plus large que la nôtre. Et ça c’est fort plaisant.
La Bande à Lascaux, les premiers thugs pas légitimes
“Hey, j’ai envie de dessiner un mammouth sur ce mur mais je sais pas si je suis légitime.” Entendu à Lascaux en 17 000 avant Jésus Christ.
Faux.
La bande à Lascaux2 a fait des dessins sur les murs 19 000 ans avant l’invention de la bombe aérosol et du graffiti. Culotté !
La bande à Lascaux a fait des dessins et tout un tas d’autres trucs qu’iels avaient envie de faire et après iels sont morts. Est-ce que dessiner sur les murs les a aidé à survivre contre les attaques de mammouths ou à s’assurer qu’iels auraient de quoi manger ? Non.
Est-ce que ça a participé à l’évolution de notre race et donc de tout ce à quoi nous sommes connecté.e.s ? Oui. C’est parce qu’ielsont fait un mammouth au charbon gras entre deux attaques surprises qu’on a pu évoluer et développer la multitude d’outils et de moyens d’expressions visuelles qui existent aujourd’hui. Netflix est un dérivé du Mammouth.
Est-ce que ça les a rendu vivant.e.s et pas juste survivant.e.s ? Fort à parier.
Autrement dit, la bande à Lascaux a vécu sa vie, tout simplement et ça dessinait parce que ça avait envie de le faire, pas parce que ça se sentait légitime.
Ce que j’essaye de dire par là c’est qu’il fut tout un temps où personne ne se demandait s’iels étaient légitimes, iels suivaient leur flow, leur vibe, leur intuition, leur curiosité, leur envie de faire. Et la seule raison pour laquelle c’est différent maintenant c’est qu’on nous impose un résultat. On nous demande de justifier pourquoi on passe du temps à faire telle ou telle chose. Si on écrit, soyons publié.e, si on ouvre une chaîne YouTube, ayons des milliers d’abonnées, si on fait de la musique, bookons une tournée… Faire ne suffit pas, on nous demande de rayonner. Et si partager avec les autres est essentiel, demander un impact quantifiable et immédiat pour donner du sens à ce que l’on fait est un gros :
Hold-up.
À l’origine, l’embranchement
Si quelque chose t’énerve, fais quelque chose ou ferme-la.
Cette phrase3 de Tina Roth Eisenberg a changé ma vie. Si je m’entends trop souvent répéter la même plainte, je sais que sois je dois faire quelque chose pour changer ça, soit je dois la fermer puisque je ne veux pas vraiment que ça change, je veux juste me plaindre.
Or il y a une chose qui m’énerve beaucoup et c’est le hold-up du sens de nos vies.
Voir des personnes traverser leur vie convaincues qu’elles doivent attendre l’alignement des planètes, le tape-tape sur l’épaule, la garantie que c’est logique, utile, important de faire ce qu’elles ont envie de faire m’énerve.
Et j’ai envie de faire pour essayer de changer ça, alors j’ai décidé de faire.
Il y a une chose pour laquelle j’ai une facilité naturelle, c’est d’activer les genstes pour qu’iels expriment leur potentiel. C’est un talent un peu bizarre mais c’est mon truc, que voulez-vous. Pendant longtemps j’ai utilisé cette aptitude à l’échelle de mon entourage, et maintenant j’ai décidé de contribuer sur une échelle un peu plus large.
Du coup j’ai créé un mini-atelier pour parler de comment faire justement. Comment dépasser les soucis de légitimité et de succès et se donner les moyens de suivre sa voix4. Pour partager ce que j’ai appris et compris à force de me lancer dans des projets, de les mener à bout, de les voir prendre ou pas, de me demander quel sens ça a tout ça et si je vais finir sous un pont. Car oui, je suis comme tout le monde, j’ai un loyer à payer, un frigo à remplir et la peur de finir sans le sous à marmonner des plaintes sur un banc seule à 80 ans.
J’ai créé cet atelier parce que j’en ai marre de nous voir évoluer vers une standardisation mondiale des imaginaires. C’est ma contribution à notre danse évolutive. Ça marchera, ça ne marchera pas, je n’en sais rien mais qu’importe. Ça ouvre un dialogue avec vous et ça ça justifie déjà le “risque”.
Si ça chatouille votre coeur, vous pouvez lire toutes les infos ici. L’atelier a lieu en live le dimanche 28 Novembre à 16h, et si vous ne pouvez pas en être, vous pouvez toujours vous inscrire car vous aurez accès au replay pendant au moins un an.
Je ne savais pas que j’allais écrire tout ça, apparement j’avais le coeur débordant.
Finissons quand même sur une belle note : la vie ça va. Car même les énervements deviennent source de vie quand on fait.
Câlin de 10 secondes5,
Nathalie
à des hommes
petit surnom affectueux
“If you’re not happy about something, you should either do something or shut up.” Extrait de son talk à 99U Don’t Complain, Create.
avec un X, oui.
Car le câlin de dix secondes possède de nombreuses vertus.